Ce soir, j'aimerais vous parler de titre.

Être avocat, c'est avoir un titre et donc une place relativement claire dans la société, au moins au niveau des apparences.

D'ailleurs avant de devenir avocate, je ne me suis jamais vraiment préoccupée de ce qu'il y avait derrière le titre. Personnellement, j'avais hâte de prêter serment pour mettre un point final à ce long parcours d'études, mais surtout pour pouvoir enfin appeler les autres avocats "confrère" ou "consoeur". Venait ensuite, soyons honnête, la trop facile mais indispensable blague "appelle(z)-moi Maître". Passés les émois des premières semaines, je n'y ai plus tellement prêté attention. 

Puis j'ai décidé de quitter la profession. J'étais effrayée de remettre en question une certitude, et encore plus de ne pas savoir vers où j'allais, en revanche perdre le titre ne m'a pas tellement affectée. La difficulté est plus venue avec l'absence de titre de remplacement. 

Dans un premier temps, j'étais simplement en vacances. C'était l'été, juillet-août, rien de louche à ça. Puis septembre est arrivé. Quand on me demandait ce que je faisais dans la vie (cette question terrible qu'il faut apprendre à ne pas poser) je ne savais jamais quoi répondre. Chômeuse ? Je ne touchais pas d'allocation chômage. Demandeuse d'emploi ? Pas vraiment, je n'en cherchais pas tout de suite. Étudiante ? Sciences Po n'avait pas commencé. J'évitais la question, et si vraiment je n'avais pas le choix, je répondais que j'étais ex-avocate en droit pharmaceutique, que j'étais en transition professionnelle. Autant dire rien : ce que j'avais été, et du flou, le tout enrobé dans beaucoup de gêne. 

Pourtant en septembre je m'étais attelée sérieusement à mon projet de podcast, qui était de moins en moins un projet et de plus en plus une réalité. Le site internet était en route, plusieurs interviews étaient enregistrés, je passais du temps à comprendre comment fonctionnait un podcast. Qu'est-on lorsqu'on créée quelque chose ? Lorsqu'on a un projet qui est déjà un peu plus qu'un projet ? 

Puis j'ai commencé à diffuser le podcast, donc là ce n'était plus un projet : je produisais un podcast.

Ensuite j'ai eu l'idée de la formation Bien dans ma robe et rebelote. Février, mars, avril 2019, j'ai travaillé dessus, fait les démarches pour que Fleur d'avocat soit une entreprise et une marque déposée. Ce truc allait voir le jour, et effectivement la première session a eu lieu en juin.

Aujourd'hui je produis un podcast, j'imagine, je conçois et j'anime des formations. Pourtant je ne me sens ni podcasteuse, ni formatrice. 

Mercredi j'ai déjeuné avec une ancienne avocate devenue coach, médiatrice, et formatrice. En l'écoutant et en la regardant, je sentais bien son plaisir à faire ce qu'elle fait : du coaching, de la médiation, de la formation. Alors je lui ai confié quelque chose que je vous confie à mon tour : ce que j'aime le plus, ce n'est pas le podcast ou la formation*, mais bien d'avoir une idée et de la mettre en oeuvre.  De répondre à un besoin. De penser à ce que ça peut devenir. De construire quelque chose. 

Depuis cet automne, j'arrive à me présenter comme entrepreneuse, et c'est le "titre" dans lequel je me sens le plus à l'aise justement car il me laisse beaucoup de liberté d'action. 

Je me rends compte en écrivant ces lignes que j'ai troqué un titre flou contre un autre. Être avocat ne veut rien dire en soi tellement ce titre recouvre de réalités différentes. C'est un peu pareil avec l'entrepreneuriat. 

Tout ça pour ça me direz-vous ? Oui. À la différence que maintenant, je suis à l'aise avec le flou 🙂 

Je vous souhaite un très bon weekend,
 Lilas Louise

*je précise quand même que je prends beaucoup de plaisir à produire le podcast et à animer les formations  !