10 juillet, vous êtes nombreuses et nombreux à boucler les dossiers avant de partir en vacances pour une pause bien méritée après une année, disons-le, éprouvante. Entre les grèves (des transports, des avocats), le coronavirus avec son confinement (qui n'a potentiellement pas dit son dernier mot), et le crowdfunding Fleur d'avocat, il est grand temps de passer moins de temps sur votre boite email et plus de temps à regarder la mer, les pages de votre bouquin, les yeux de votre amour, votre coup de soleil trace de bronzage, ou tout autre chose devant laquelle votre esprit part à la dérive. 

Moi je viens de rentrer de 3 jours à Marseille à vivre au ralenti. Programme minimaliste composé de très bonnes choses à manger, de chaleur à l'ombre face à la mer, et de longues discussions avec une amie chère qui me connait par coeur. Et comme elle me connait par coeur [pour celles et ceux qui ont vraiment suivi toutes les interviews, c'est mon binôme de travail à la fac], elle a pu choper chacun de mes regards soucieusement perdus dans l'avenir plutôt qu'ancrés dans l'instant présent. "Tu crois que je te vois pas penser à la suite alors que t'es en vacances Marech' ?", qu'elle m'a dit, l'insolente [oui parce que certaines personnes me surnomment Marech']. 

Mon coach a une théorie. Selon lui, j'ai plus peur de réussir que de me planter. Et c'est peut-être vrai. Parce que franchement réussir emporte aussi son lot d'emmerdes(oui je suis vraiment entrain de me plaindre de réussir, vous avez le droit de me trouver odieuse). Vous voyez là, j'ai réussi ce crowdfunding. En plus j'ai des pré-ventes ! Donc il va bien falloir que je les ponde ces formations. Je ne peux pas juste disparaître et vous dire ciao les nazes*, c'était sympa mais en fait je préfère aller danser le tango argentin à Buenos Aires. 

Ce qu'on a déjà fait semble toujours facile a posteriori, mais j'ai vraiment l'impression que les vrais ennuis commencent maintenant. Organiser la production, écrire les scripts de mes modules, travailler avec les intervenants des autres modules sur leurs propres contenus de formation, tout organiser dans la plateforme de e-learning, le tout en préparant l'audit pour la certification Qualiopi, sans oublier toutes les micro tâches dont je n'ai pas idée mais qui vont se présenter au fur et à mesure en mode "coucou tu n'avais pas pensé à moi mais j'existe". Et après il faudra vendre. Mon dieu, sauvez-moi de là. 

Je sais que vous savez de quoi je parle. Vous avez fait 4 à 5 années de droit, et vous êtes sur le point de passer le CRFPA. Vous avez survécu à vos premiers mois de collaboration et on vous envoie un premier dossier perso que vous avez la folie d'accepter. Vous êtes devenu•e un•e bonn•e avocat•e, vous avez développé de la clientèle, et vous devenez associé•e. C'est pas la merde, franchement ? 

Je ne pensais pas du tout vous raconter ça aujourd'hui (d'où l'objet qui n'a rien à voir avec le contenu), mais peu importe. Là j'en suis au stade flippette du travail que je vais devoir fournir cet été et cet automne pour faire un truc bien en tenant le timing.

La bonne nouvelle, c'est que réussir comporte aussi l'antidote au lot d'emmerdes. Si on regarde sa réussite droit dans les yeux, en osant la qualifier de réussite, en en étant fière l'espace d'un instant (de deux instants, soyons généreux), et bien on peut aussi gagner en confiance en soi, en sa capacité à faire des trucs qui nous paraissaient inimaginables il y a quelques jours / semaines / mois. En son pouvoir d'action et de réalisation. 

C'est amusant car je viens de terminer Circé de Madeline Miller. Circé, fille d'Hélios et d'une nymphe, est un peu une looseuse parmi les dieux. Sorcière mais loin d'être aussi épatante que ses frères, elle va pourtant faire des trucs fous, genre tenir tête à Athéna (oui, la déesse de la guerre, rien que ça) et obtenir la queue du Trygon (un monstre marin que personne n'a osé affronter). De truc fou en truc fou, elle ose de plus en plus. Et le mieux, c'est qu'elle reste humble. [J'étais sur le point de vous parler de son geste ultime d'humilité mais ce serait vous spoiler la fin de l'histoire donc non.] 

Je vous en parlerai dans une autre Lettre, mais j'ai dépassé tellement de peurs en faisant ce crowdfunding. J'arrive toujours pas à croire que j'ai fait tout ce que j'ai fait pour le réussir. Je me demande même un peu qui est cette personne qui a fait ces trucs. Elle est encore à Marseille, elle ne s'est pas réveillée de sa sieste à Figuerolles. Mais elle est là quelque part en moi, et c'est cool de savoir qu'elle existe. J'espère qu'elle continuera à me faire faire des trucs fous. 

Pensée pour vous qui l'avez supportée ces dernières semaines. Et merci aussi à vous qui l'avez suivie dans le délire en contribuant. Nous sommes sincèrement touchées par votre soutien.

Bon weekend ! Bonnes vacances ! Bon repos !

Lilas Louise