Réussir sa collaboration : évaluer votre pouvoir de négociation à l'embauche.

Tout a commencé un 13 juillet sur Instagram, où une discussion s'amorce avec une élève-avocate affairiste en fin de parcours dans le sud-est de la France qui me dit qu'elle est un peu perdue sur la suite.

Je creuse un peu et il se trouve que voilà, elle a fait une L3 en fiscal, un M1 en fiscal, un M2 en droit des affaires plus généraliste pour pouvoir être en alternance qu'elle a couplé d'un diplôme en comptabilité et analyse financière, moult stages (dont son alternance) en fiscalité, et elle galère à trouver une collaboration en fiscalité [son kiffe ultime] car elle aurait un parcours "atypique" du fait de son M2 et aussi que tout ceci ne vaut pas un DJCE.

[beaucoup de choses à dire sur l'utilisation de l'adjectif "atypique" pour qualifier le parcours de cette jeune femme].

Je rebooste notre jeune surdiplômée en panique quant à son employabilité et je la renvoie vers mes 

 sur LinkedIn, en lui disant que j'ai vu passer une offre d'une grande structure à Nantes.

S'ensuit :

29 juillet : c'est décidé, elle part à Nantes. Elle n'a pas encore de collab, mais elle a envoyé des CVs, déjà passé des entretiens dans un cab et attend le retour d'autres structures.

1e août : elle a une offre et deux autres processus de recrutement sont en cours.

Je l'invite à négocier.

Réponse : "Je ne sais pas si c'est la bonne stratégie parce qu'ils se sont vraiment dépêchés pour me donner une réponse donc je ne me sens pas forcément de les faire attendre, d'autant plus que je rêvais des rejoindre, ce cab dans cette matière, c'est le nec plus ultra".

Si si, c'est justement le meilleur moment pour négocier, mais passons.

25 août : elle a signé sa collab dans le cab de ses rêves à Nantes [elle n'a pas négocié].

8 septembre : "J'ai une petite situation de crise avec [cabinet] et j'ai peur que le poste me passe sous le nez, tu as quelques instants à m'accorder ?".

[le nectar de cette newsletter se trouve dans ce dernier rebondissement.]

Le rebondissement en question, c'est le service RH centralisé de la structure à La Défense qui lui dit "bonjour on aimerait bien que vous arriviez le 11 octobre plutôt que le 2 novembre comme prévu initialement avec l'équipe à Nantes".

Cette jeune femme a donc peur qu'on lui retire la collab si elle n'accepte pas d'avancer son arrivée dans la structure et est en panique [précisons même si ce n'est pas l'argument principal que c'est compliqué d'avancer son arrivée à cause des oraux du CAPA dont la date n'est pas déterminée et du déménagement].

À votre avis, quelle est la probabilité que la collab lui passe sous le nez si elle ne peut pas avancer son arrivée de 3 semaines ?

...

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Bon, j'exagère un peu car il y a toujours un risque infime, mais à peine.

Pourquoi ? Parce que manifestement

  • ils se sont jetés sur sa candidature
  • les offres en fiscalité pullulent
  • annuler son recrutement ça veut dire trouver une nouvelle personne
  • trouver quelqu'un en droit fiscal c'est galère [notamment en province], alors imaginez trouver quelqu'un un 13 septembre pour un 11 octobre, encore plus quand ce quelqu'un est un junior et que tous les juniors ont le même problème de CAPA à passer
  • c'est aussi galère car en interne ça mobilise au moins une RH, plus plusieurs personnes de l'équipe, qu'il y a le temps d'entretien + le temps de l'administratif.

Donc je lui dis qu'elle peut tranquille rester ferme sur la date du 2 novembre et je la coach sur la manière de formuler les choses.

Résultat :

 La RH l'a rassurée sur le fait qu'il n'y a aucun problème pour son arrivée le 2 novembre, lui a avoué qu'au contraire c'est eux qui avaient peur qu'elle ne vienne pas, qu'ils ont eu beaucoup de mal à trouver, qu'ils comptent sur elle et sont super contents et impatients de sa venue.

Bref, tout est bien qui finit bien.

Reste que cette jeune avocate a deux choses importantes à apprendre aujourd'hui qui n'ont rien à voir avec le droit :

- avoir confiance en elle

et aussi, et ça on en parle beaucoup moins, si ce n'est jamais :

- évaluer son pouvoir de négociation

Pour identifier quand oser négocier sa rétrocession d'honoraires ou des avantages en nature, mais aussi pour avoir une meilleur idée des demandes auxquelles ont peut résister, ou pas.

Donc poser les bonnes limites.

Et donc, avoir une bonne qualité de vie au travail.

Par conséquent, être une avocate collaboratrice bien dans sa robe.


"Merci pour cette newsletter toujours aussi passionnante, stimulante et qui donne envie d’avancer avec toi”
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